Il rentra chez lui, exténué par la mission. Les enfants qui l'accompagnaient étaient trois. Il n'en avait pas dit un mot au Maître, de crainte qu'il ne réagisse négativement. Vance était bon, il ne les laisserait jamais revivre la même expérience. Il soupira en les regardant, allongé sur un canapé, écoutant de la musique. Ils n'arrêtaient pas de courir en criant dans les couloirs de sa maison. Insupportables créatures... On pouvait les entendre depuis le Bureau du Maître. Agacé, il leur jetait de temps à autre un regard féroce qui les faisait taire. Il entendit alors quelqu'un frapper à sa porte. Il resta figé sur le canapé. Rien ne pourrait le détacher de ses occupations. Rien ni personne... Soudain, il sursauta, se crispant, en entendant une explosion venant de la porte d'en bas. Il se précipita dans les escaliers, tandis que les enfants le fixaient curieusement. Il leur fit mine de ne pas bouger d'un geste de la main. Il contempla les dégâts de l'explosion, il ne dit rien, il mima juste de grands gestes nerveux de la main. Il avait envie d'étrangler quelqu'un, maintenant, tout de suite. Combien coûtait un peu près une porte? Comment la fixer? Il poussa un cri de rage, puis leva les têtes vers l'auteur du désastre. Parmi la fumée qui se dégageait de l'explosion se trouvait une fille, qui lui tendait un chat noir, qu'elle tenait dans les mains. Ces yeux menaçants, cette tignasse rousse, et cette silhouette menaçante... c'était sa voisine! Il avait horreur de la fréquenter, parce qu'elle détruisait généralement tout ce qui lui appartenait.

Tout, à part ce maudit chat. Elle n'avait vraiment pas le sens des propriétés. Ce chat, n'était même pas à lui, il ne savait pas pourquoi mais les animaux harcelaient sans cesse. C'était encore plus effrayant. Le jeune homme tendit à son tour les mains pour attraper le chat, le tenant dans ses bras. Il hocha la tête, dépité, et esquissa un sourire pâle. Mieux valait ne pas la vexer, ou ne pas l'énerver... Il ne la comprenait vraiment pas, mais il ne fallait pas qu'il cherche la logique. Il balbutia un merci, toujours le regard fixé sur son interlocutrice. Elle ne dit rien pendant un long moment, le laissant imaginer la réponse incohérente qu'elle allait lui donner. Cependant, contrairement à ce qu'elle pensa, elle ne dit pas un mot, elle sourit juste. Il sourit à son tour. Le rictus de la voisine s'évanouit, le sien aussi. Elle se retourna et s'en alla, comme si rien ne s'était passé. Un des membres de la guilde passait devant chez lui à ce moment. C'était ceux qui l'avaient bousculé, il y a quelques semaines. Il siffla en regardant la porte cassé, puis continua son chemin en ricanant. Ses colocataires s'empressèrent de venir voir ce qu'ils s'étaient passés. Ils regardaient le seuil d'un air choqué, puis repartirent en se tordant de rire. Ces gosses... Mais il n'en tint pas longtemps compte pour se concentrer sur son principal problème. Pourquoi? Pourquoi avait-elle fait ça? Vance poussa un nouveau soupir et s'arrangea pour recoller la porte avec un paquet de scotch et de maintenir son équilibre avec un kilo de chaises qu'il plaça juste derrière. L'entrée la plus sûre restait toujours la fenêtre...

Il espionnait sa voisine, depuis le balcon, d'un oeil de givre. Qu'est-ce qu'elle avait derrière la tête, celle-là? Il se retira trop tôt, pour s'occuper des enfants, pas assez longtemps pour apercevoir le sourire moqueur de la voisine... Il n'y avait pas que lui qui avait le droit de se moquer des autres, nan?