"On a tous des petits secrets"

Le son de mes pas sur le sol craquelant, une nuit de pleine lune, raisonnait d'un son feutré pareil à celui d'un souffle dans une montagne enneigée. Une pluie fine tombait sur les loupiotes accrochées aux balcons de la ville, qui finirent par s’éteindre. Quelques nuages arpentaient la voûte céleste dévoilant par endroits des étoiles. La nuit... en voilà une belle chose, mystérieuse et éclatante, l'antagonisme à son apogée, le silence majestueux de l'obscurité s’immisçant dans nos rêves tourmentés... Les ombres portées de la lune sur les arbres, visions macabres et ensorcelées du blanc le plus immaculé sur terre...

En quelques sauts je me hissais sur le toit de la guilde. Le nez au ciel, les yeux brillants, un sourire vague accroché aux lèvres. L'air vivifiant gonflant ma poitrine.

Cette nuit sans brise était d’un calme particulièrement apaisant pour moi. Un nuage de condensation s’échappa de ma bouche.

« Qu’as-tu à me raconter de nouveau aujourd’hui ? »-murmurais-je.

Quelques minutes passèrent, dans le calme, puis la pluie s’intensifia. Mes cheveux se collèrent contre mes joues rougies par la rigueur de l’hiver qui débutait à Magnolia.  

« Je vois… Tant mieux... Eh bien, je vais me coucher ! A demain ! »-répondis-je.

Vous devez probablement vous demander à qui je parlais ? C’est un secret entre elle et moi. Mais vous finirez peut être par comprendre ! Il est bien connu que chacun a ses secrets, et que l'on est jamais plus heureux qu'en ne gardant pour nous ces petites choses, aussi futiles soient elles, égoïstement, pour nous. C'est aussi ça, ce que l'on définie de « bonheur pur et simple ».

Il y a déjà bien longtemps, que les habitants de cette ville, les insomniaques, les travailleurs de nuit, les arpenteurs de lune, me connaissent. Souvent surpris de me voir ainsi assise sur le toit de la guilde en pleine nuit, j’étais devenu pendant un temps la curiosité du village. 'Mais qui est cette fille qui passe ses nuits là ? '…. 'C'est une folle vous-dis-je ! '…. 'Moi j'aimerais bien savoir ce qui la motive '.

Mais comme toutes les modes passent, ils avaient fini par me foutre la paix ! Et j'avais pu reprendre mes petites habitudes. Je me fichais de ce que les gens pensaient de moi. Néanmoins, je me fichais un peu moins du fait qu'ils m'espionnent lors de mes petites entrevues nocturnes. C'était la chose la plus désagréable au monde !

****

De retour dans mon lit, le réveil affichait déjà *3:00*, je soupirais avant de m'étaler sur mon lit. Les bras écartés, les yeux fusillant le plafond. Demain une mission m'attendait, je ne connaissais ni le pourquoi ni le comment de la mission, et ce n'était pas le plus grave...

En effet, plus tôt dans la matinée le maître de la guilde m'avait informé que la mission que j'avais choisie ne devait pas s'effectuer seul. Ô joie ! Un partenaire....  Qu'elle n'était pas ma joie de savoir que j'allais probablement me traîner un animal dans les pattes.

J'étais d'ordinaire une personne très sociable, enjouée, et protectrice. Cependant, j'avais horreur d'échouer, et pour moi, si un partenaire peut permettre la réussite plus rapide, il peut aussi compromettre totalement la mission. C'était quelque chose qui me faisait réellement peur. Admettre un risque indépendamment de moi, un paramètre que je ne pouvais pas contrôler !

-Bon... au lit ! -me dis-je en guise d'encouragement.

Je pris le temps de me déshabiller en me levant du lit, d'attacher mes cheveux et de me diriger vers la douche. L'eau était bien chaude, de quoi détendre mes muscles endoloris par l’entraînement intensif d'hier. Quelques minutes plus tard, séchée et vêtue d'un  kimono très léger, je rejoignais mon lit, afin de profiter des quelques heures de sommeil qu'il me restait.
Le son de la pluie ne tarda pas à m'endormir...